
Le réalisateur anglais Ken Loach (Kes, Family life, Just a kiss, Le vent se lève) frappe une nouvelle fois très fort avec ce film qui dénonce l'exploitation des travailleurs immigrés clandestins.
Angie, une jeune femme de 30 ans, travaille dans une agence de recrutement qui va chercher ses travailleurs dans les pays de l'Est. Licenciée par un patron qui ne lui pardonne pas sa conduite en public, elle décide de prendre son destin en main en créant, en toute illégalité, parce qu'elle ne dispose d'aucune réserve financière, sa propre boîte d'intérim. Avec son amie Rose, elle est décidée à avoir, elle aussi, sa part du gâteau. Déterminée, elle va bafouer les droits humanitaires les plus élémentaires et reproduire, avec tous ses excès, les travers d'un système qui exploite la misère.
Avec ce film, Ken Loach fait le choix de se placer du point de vue d'une femme d'aujourd'hui dans toute sa complexité. Jeune, ambitieuse, énergique, féministe, elle possède, des qualités qui pourraient, a priori séduire. Aspirant à plus de liberté dans un monde qui revendique le modèle du miracle anglo-saxon, elle va très vite "passer de l'autre coté". De victime, elle devient complice d'un système corrompu où les valeurs de l'argent, la priorité de la réussite économique, la compétition, valent plus que tout, fussent au détriment d'une vie sociale et familiale qu'elle a complètement déserté en confiant son jeune garçon à ses parents.
Ken Loach ne juge pas Angie. C'est la violence qui s'insinue par toutes les pores d'une société en mal de repères que Ken Loach décrit dans ce constat amère et impitoyable. Il cherche à faire de nous des témoins de la faillite d'un système d'aliénation qui réveille tous les égoïsmes jusqu'à commettre l'inadmissible. Il veut susciter la réflexion en chacun de nous pour réveiller les consciences. Il montre et démontre que vivre dans un monde libre ne veut pas dire faire n'importe quoi dans le seul but de satisfaire ses ambitions personnelles.
Merci, Monsieur Ken Loach, pour ce cinéma militant que vous portez avec intelligence, brio et sans manichéisme. Notre monde libre a besoin de vous.
("It's a free world" a obtenu le Prix du scénario à la 64ème Mostra de Venise)