samedi 10 janvier 2009

Les plages d'Agnès

Une femme aux yeux rieurs, au coeur léger fait face à la caméra. "Je me souviens pendant que je vis". Retour sur son passé, son histoire, ses rencontres avec ses amis, sa famille du cinéma, Jacques Demy, son mari trop vite disparu à cause de cette saloperie nommée Sida. "Aimer le cinéma, c'est aimer Jacques Demy, la peinture, la famille et les puzzles".


Non vous ne rêvez pas, il s'agit bien d'un film, un vrai film plein d'intelligence, le dernier d'Agnès Varda, la réalisatrice de "Cléo de 5 à 7" (1962), de "Sans toi ni loi" (Lion d'or à Venise en 1985) et "Les glaneurs et la glaneuse"(1999). Elle a réalisé aussi trois documentaires en hommage à Jacques Demy, son époux: Jacquot de Nantes, Les demoiselles ont eu 25 ans et L'univers de Jacques Demy. Deux enfants sont nés de cette union: Mathieu Demy, acteur, et Rosalie Varda, costumière de cinéma.

Cet autoportrait qu'elle nous livre aujourd'hui, elle en est à la fois le sujet et l'auteur. Portrait d'une femme libre et curieuse. D'habitude, c'est elle qui regarde. Cette fois, c'est elle qui est regardée. Au bord des mers et des océans où elle aime marcher et contempler. La perte de mémoire est au coeur de ce film enjoué, festif, plein de jolies trouvailles, sans prise de tête. Toutes les histoires dont elle dresse l'inventaire ou qu'elle reconstitue, ne sont qu'un jeu, un puzzle de curiosités enivrantes. Le tempo est rythmé, le récit bien mené. Elle s'amuse et nous amuse.

Nous tombons sous le charme d'une grand-mère qui a photographié Jean Vilar au Festival d'Avignon, Godard (sans ses lunettes) aux débuts de la Nouvelle Vague, qui a fait faire des essais à Harrisson Ford lorsqu'il était adolescent. Elle évoque sa vie avec Demy, son amitié avec Delphine Seyrig, ses voyages à Cuba et en Chine, et quand elle prend les siens à témoin, c'est pour les inviter à danser sur la plage en costumes d'antan.


"Dans ma vie, j'ai été bien entouré. Dans mes miroirs, j'ai rencontré les autres, des autres et des plages et toutes sortes de gens. Je les ai filmé ou pas, compris ou pas, admiré", déclare-t-elle d'une voix retenue. L'émotion est palpable. Une leçon de cinéma, une leçon de vie. Avec cette énergie qui la caractérise, on ose espérer que ce film ne sera pas le dernier. Cette "petite vieille" de 80 printemps a sûrement encore bien des chose à nous dire.